Infinite Jest.
De David Foster Wallace. Publié en 1996 et se déroulant dans son ensemble à peu près maintenant à deux années près.1 kilo 2 environ (un peu moins), 1079 pages dont une petite centaine consacrées à des « notes and errata » (au nombre de 388). Pour l’instant, 180 lues (avec 59 notes). En guise de note, je précise que si citations il y a, elles seront accompagnées du numéro de page correspondant à l’édition que j’ai (celle du dixième anniversaire de parution, à 10$, avec préface de Dave Eggers qui nous explique sa faim).
Introduisons donc. Rapidement.
Le titre du roman vient d’un film (en réalité de cinq) que l’on retrouve dans la filmographie de James O. Incandenza (en cadence !)—filmographie relativement étendue de ce cinéaste d’après-garde—, personnage décédé pendant une bonne partie de l’histoire et père du pour l’instant protagoniste principal : Harold Incandenza, Hal pour les intimes et les autres aussi. Sachant que la cinquième version est inachevée (presque : Incandenza est mort durant la post-production, suicidé par un four à micro-ondes), on peut parler d’Unfinite Jest, qui est incorrect mais rigolo. Disons aussi qu’il y aura cinq vues de plus en plus ensembles sur la totalité du bouquin, et j’espère ne pas me faire attaquer par un four à gaz après. Le plus drôle sera de chercher après coup d’où vient le titre des films d’Incandenza.
Le problème des quelques mots qui vont suivre est principalement qu’ils ne s’axeront que sur les 200 premières pages du bouquin, ce qui bien évidemment empêche une vue d’ensemble mais aura au moins le mérite avec les autres papiers écrits dessus à la suite d’avoir un avis que l’on peut supposer évolutif et plus large qu’un condensé post-lecture. Bref tout cela est bien mignon et Dave Wallace est assez drôle, paraît très capable d’un seul point de vue de la collusion des styles, les chapitres découpés suivant des années portant des noms de produits (imaginez, en français, que l’an 2032 pourrait être l’année du PQ Moltonel© ou l’année des Pringles parfum menthe-abricot à 23 kcal aux cent grammes), lancés dans une sorte de désordre joyeux. Le monde Nord-Américain présenté est dirigé par l’O.N.A.N., qui, en plus d’être l’Organisation des Nations d’Amérique du Nord, est aussi un bon prétexte pour faire des blagues onanistes.
Hal Incandenza est un jeune tennisman étudiant à l’E.T.A. (Enfield Tennis Academy—fondée par feu son père), réciteur de l’English Oxford Dictionnary et fumeur, bongeur ou sniffeur d’une quantité de choses (à ce propos, les précisions apportées sur une foule de foule de trucs pas, peu ou prou nets sont légion et feraient presque pâlir William Burroughs). Orin, son grand-frère est joueur pro chez on s’en fout, et Mario, l’autre grand frère moins grand tout de même (l’étrange est que lors de son premier dialogue avec Hal, je n’avais aucun doute sur qui était le grand de l’autre frère, avant de voir qu’en fait non—comprenez ce que vous voudrez sur ce que peut être Mario). Et d’autres. Dont des séparatistes du Québec ; les Assassins des Fauteuils Rollents. Et cætera, et cetera. L’affaire se corse à Enfield ou plus loin quand le père de feu James O. En Cadence pond à son fils (en 1960) un monologue d’une dizaine de pages (c’est écrit assez petit) supposé l’aider à le faire devenir le grand joueur de tennis qu’il deviendra, le former dans son futur jeu étant donné que lui (le père de James) a eu un père absent qui ne venait jamais à ses matchs sauf une fois, que tout cela est de toute façon la faute de Marlon Brando (et un peu celle de James Dean), quand D.F. Wallace nous explique pendant environ le même nombre de pages pourquoi ô grands dieux pourquoi malgré toute cette nouvelle technologie visiophonique et ainsi de suite pourquoi les gens préfèrent le bon vieux téléphone avec ses six et six² (=36) trous pour parler et entendre quand ils sont loin ou encore quand John (« Aucun Rapport ») Wayne, camarade d’Hal et tennisman numero uno du continent américain de moins de dix-huit ans, corrige oralement une faute écrite qui ne s’entend probablement même pas (plateaux et non plateaus, encore un mot lié au cinéma d’ailleurs), en sachant que James En Cadence possède dans sa filmographie une sorte de documentaire (une parodie d’antidocumentaires poststructurels pour être exact) intitulé Homo Duplex, consistant en interviews de quatorze dénommés John Wayne et n’ayant aucun rapport avec le fameux acteur, quand d’autres éléments de cette filmographie se retrouvent placés au milieu de l’histoire par touche voire quand un de ses travaux est à peu de choses près une scène du roman (Hal et le conversationalist par exemple), quand on retrouve des notes qui font huit pages (c’est écrit encore plus petit…) et des phrases anacondalement longues et drôles et qu’on se sent plus ou moins obligé d’en placer au moins une de taille certes conséquente par convention mais somme toute réduite pour parler du bouquin en question (au moins ne ferais-je pas de note), l'affaire donc se corse en un ensemble Massachussetsien de drogués enfermés, de tennismen drogués, de rebelles en fauteuils roulants, de bâtiments en forme de poumon ou de cœur.
C’est drôle. Et bizarrement presque, attachant, de quoi avoir du mal à décrocher la tête de son bouquin. Le tennis, je m’en cogne. Et pourtant, ça marche.
Extroduisons. Pour la suite qui s’annonce encore longue mais à palpiter un peu au moins les doigts qui tou—qui parcourent les pages pleines de ce monde expérialiste au temps divisé par les hamburgers et les barres de chocolats.
27.6.07
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3 commentaires:
Rhââh! Mon exemplaire d'Infinite Jest est encore en commande et n'arrivera pas avant deux semaines, et voilà un post qui me fait bien trop tôt saliver, alors mes préjugés sur DFW viennent tout juste de tomber.
En tous cas, bravo pour ce texte, et aussi et surtout pour ceux sur Pynchon, qui sont parmi les trois ou quatre meilleurs que j'aie pu lire en français sur le wouaib.
YOUR show MUST go on!!!
Amazon ? Pas cher mais pas rapide non plus ?
Des préjugés ? Quel donc genre ?
Eeeeh oui, Amazon : ça coûte moins cher qu'envoyer des cosmonautes assembler une station-mécano dans le vide de l'espace, mais ça met bigrement plus de temps à faire le trajet...
Sinon, mes préjugés (pardon pour le "que" ayant sauté dans mon commentaire hâtif car enthousiaste), hé bien dès que je voyais en librairie anglofône un exemplaire d'IJ, je ne pouvais m'empêcher de me dire, moi que pourtant les gros livres ne rebutent pas au contraire, que là on dépassait les limites du big novel, et je m'interrogeais en fait sur la possible vacuité que pouvait dissimuler ce style trés particulier, cette manie du mot précieux, des notes de bas de page (qui sonnait plus comme un "truc" postmoderne que comme une rélle nécessité), du style peut-être ampoulé (je rappelle que je ne faisais que feuilleter le mastodonte), et puis je trouvais la réputation de wunderkind US de DFW un peu trop suspecte pour être méritée --- tout ceci jusqu'à une discussion récente avec l'ami Odot, qui en quelques minutes a su me faire entrevoir toute l'ironie et la douce folie du projet de DFW et quelques autres faits encore, résultat mes préjugés ont tous plongé avec vergogne et voilà j'attends toujours mon bel exemplaire.
(Nous nous excusons d'avance du caractère un brin méandreux de ce commentaire - Note de la Rédaction)
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